fusions hospitalières
Fusions et regroupements hospitaliers :
quel bilan pour les 15 dernières années?
https://www.igas.gouv.fr/IMG/pdf/RM2012-020P.pdf
1. LES FUSIONS S’INSCRIVENT DANS UN PROCESSUS CONTINU DE
RESTRUCTURATION QUI PERMET AUX ETABLISSEMENTS DE SANTE DE
S’ADAPTER A LEUR ENVIRONNEMENT
Les hôpitaux doivent sans cesse s’adapter aux besoins de santé, aux évolutions techniques, aux contraintes démographiques et aux ressources financières disponibles. La restructuration est un processus sans fin, qui prend des formes variées. La fusion n’est qu’une modalité de restructuration, au même titre que la fermeture, la spécialisation, la reconstruction ou la coopération.
De la Libération aux années 1970, l’accent est mis sur la construction d’une offre hospitalière publique.
Dans le cadre institutionnel fixé par la loi n° 70-1318 du 31 décembre 1970 portant réforme hospitalière, l’hôpital est considéré comme le pivot de l’organisation des soins. La mise en place du service public hospitalier, associant les établissements publics et la plupart des établissements privés à but non lucratif s’accompagne d’un important effort de modernisation.
La loi n° 91-748 du 31 juillet 1991 portant réforme hospitalière et l’ordonnance n° 96-346 du 24 avril 1996 portant réforme de l’hospitalisation publique et privée, consacrent l’émergence du niveau régional comme niveau pertinent pour l’organisation de l’offre de soins hospitaliers. Elle voit la mise en place, puis le renforcement, des schémas régionaux d’organisation sanitaire (SROS) et la création des agences régionales de l’hospitalisation (ARH).
La loi du 31 juillet 1991 fait apparaître les réseaux de soins, que les ordonnances de 1996 conforteront, engageant ainsi une modification de la place de l’hôpital dans l’offre de soins pour tenter de mettre fin à l’hospitalo-centrisme. Enfin le nouveau dispositif de planification, avec les SROS et leurs annexes, prévoit explicitement l’évolution de l’offre de soins et, pour y parvenir, des regroupements et des suppressions d’établissements. De nouveaux modes de coopération (groupement d’intérêt économique GIE, groupement d’intérêt public GIP, groupement de coopération sanitaire GCS) sont mis à la disposition des établissements pour favoriser cette évolution.
L’ordonnance n° 2003-850 du 4 septembre 2003 et la loi n° 2009-879 du 21 juillet 2009 accentuent la volonté des pouvoirs publics de modifier significativement l’offre de soins hospitaliers en encourageant plus fortement les établissements de santé à se regrouper et à coopérer. Les SROS deviennent plus contraignants, des territoires de santé sont créés, les modalités de coopération sont simplifiées. Mais, pour l’essentiel, les nouveaux dispositifs restent facultatifs et l’on a recours à des mesures d’incitation.
Le secteur hospitalier a connu un important mouvement de restructuration depuis 15 ans
1.1.2.1. De 1995 à 2005, il y a eu près de 1 200 recompositions hospitalières en France.
Entre 1992 et 2003, 83 000 lits d’hospitalisation complète sont supprimés (représentant 15% des capacités installées). Pendant la même période, 380 établissements (11% des établissements existants en 1992) sont supprimés ou regroupés7.
En 2008 la dernière étude en date sur les restructurations hospitalières8 recense ainsi six catégories de recompositions hospitalières, qui modifient structurellement l’offre de soins sur un territoire – les fermetures de services, les conversions de services, les extensions d’activité de court-séjour, les fusions d’établissements, les coopérations entre établissements, les regroupements de structures sur site unique – auxquelles l’étude ajoute une septième catégorie « autres ».
Cette étude recense ainsi 1 146 opérations dans les secteurs : privé commercial, privé non lucratif et public, qu’elle répartit dans le tableau ci-dessous :
L’étude offre en outre des analyses affinées sur l’impact des recompositions par grands types d’activités hospitalières, sur les secteurs (public ou privé), sur les postes de dépenses des établissements.
la mission retient plus particulièrement
que les fusions d’établissements privés, plutôt conçues comme offensives se traduisent souvent par une augmentation du nombre de lits du nouvel ensemble alors que les fusions d’établissements publics, essentiellement défensives se traduisent souvent par une diminution du nombre de lits
qu’« un tiers des établissements privés ont disparu contre 4 % dans le secteur public »,
Cette présentation en pourcentage tend à accréditer l’idée que l’impact des restructurations a été plus fort sur le privé que sur le public. Dans les faits on constate au contraire que les restructurations se sont traduites |
Si l’étude « 10 ans de recompositions hospitalières en France, DEXIA/NFT, janvier 2009 » offre une photographie exhaustive du mouvement de recompositions hospitalières entre 1995 et 2005, il est difficile de disposer d’une vision actualisée pour les années postérieures à la période étudiée par NFT, compte tenu de l’inexistence au niveau national d’un outil statistique dédié au suivi de ces opérations.
Pour donner néanmoins une première image de l’impact des restructurations sur le tissu hospitalier public et privé dans les années 2000, la mission s’est appuyée sur les données de la statistique d’activité des établissements (SAE).
Evolutions du nombre de structures hospitalières et du nombre de lits d’hospitalisation entre 2003 et 2008 dans SAE
|
2003 |
2004 |
2005 |
2006 |
2007 |
2008 |
Evol Nb |
Nb d’établissements |
|
|
|
|
|
|
|
EPS |
997 |
994 |
987 |
1006 |
1001 |
983 |
- 14 |
PSPH |
564 |
573 |
560 |
565 |
554 |
539 |
- 25 |
Privé hors PSPH |
1373 |
1323 |
1309 |
1306 |
1283 |
1262 |
-111 |
Nb de lits |
|
|
|
|
|
|
|
EPS |
299102 |
294802 |
288866 |
291483 |
290067 |
284140 |
-14962 |
PSPH |
51599 |
51729 |
50517 |
50791 |
50372 |
49961 |
- 1638 |
Privé hors PSPH |
106410 |
104183 |
104384 |
106231 |
106003 |
106326 |
- 84 |
On constate que le nombre de lits a baissé dans le secteur public, signe que les hôpitaux publics n’ont pas été épargnés par les restructurations. En revanche, le nombre de structures a connu une baisse plus sensible dans le privé (-8,1 % entre 2003 et 2008 pour les cliniques) que dans le public ( -4,4 % pour les établissements participant au service public hospitalier PSPH, et -1,4 % dans le secteur public).
Ceci est la traduction |
1.2. Dans le secteur MCO, l’inégalité des contraintes externes pesant sur les praticiens explique en partie la différence de restructuration des services de court séjour
Si les personnels de direction, plus ou moins incités par la tutelle, sont souvent moteurs dans les projets de rapprochements inter-hospitaliers, pour les personnels soignants et notamment pour les médecins, le regroupement et la fusion des hôpitaux ou des services ne sont pas des démarches naturelles. Il faut donc que les contraintes soient fortes pour les inciter à adopter une démarche contraire.
1.2.1. Les déficits de la démographie médicale jouent fortement sur certaines disciplines et dans certaines régions
Evolution des effectifs de certaines spécialités
1985 1990 1995 2000 2005 2011
Chirurgiens 4050 5000 5800 7050 8550 9720
Chirurgiens orthopédistes 2620
Chirurgiens généralistes 694
Gynécologues obstétriciens 2240 3800 4400 4800 4900 5537
Anesthésistes réanimateurs 4200 7000 7850 8400 9500 10313
Cardiologues 2500 3900 4600 5100 5700 6281
Neurologues 240 650 1050 1300 1650 2016
Gastro-entérologues 1250 2050 2500 2850 3150 3412
Tous les effectifs de spécialistes ont augmenté sans discontinuer jusqu’à maintenant, le coefficient multiplicateur se situant au moins au-dessus de 2 en 25 ans.
Ce n’est donc pas le nombre qui pose problème mais la répartition des nouveaux médecins par spécialités, par régions, par territoires à l’intérieur des régions et par modes d’exercice. |
Effectifs de certains chirurgiens par secteurs d’activité
|
Hopital Public |
Total |
Chirurgie générale |
2042 |
3694 |
Ophtalmologie |
668 |
5656 |
Chirurgie orthopédique |
846 |
2620 |
Stomatologie |
138 |
1228 |
ORL |
657 |
2919 |
Total des effectifs chirurgicaux |
7982 |
25494 |
C’est donc la répartition des spécialistes qui devrait poser problème, plus que leur nombre global. En effet les jeunes internes ne se dirigent pas nécessairement vers la spécialité ou la région qui en a le plus besoin. Certaines régions dans leur ensemble (Picardie, Champagne-Ardenne, Centre…) ou certains départements au sein de régions bien fournies (Ardèche, Lot, Seine et Marne), peinent à assurer la relève minimale. Pour autant, l’effet de recomposition n’est pas toujours en cohérence avec ces constats : les fermetures et les fusions ne se produisent pas mécaniquement là où les effectifs périclitent.
L’Igas passe pudiquement sous silence le fait que les ARH exploitent ces difficultés de renouvèlement (et parfois les provoquent) pour imposer des fusions et des suppressions de services dans les EPS. |
1.2.2. La permanence des soins pèse sur une fraction seulement des praticiens des établissements de santé
Les gardes et les astreintes opérationnelles réellement actives touchent avant tout les obstétriciens dans leur ensemble (public, privé, ESPIC) et les chirurgiens viscéraux et orthopédiques des établissements publics ou PSPH. Ce poids peut devenir difficile à supporter lorsque les gardes reviennent trop souvent et/ou sont trop chargées et pousser ainsi les professionnels à se regrouper pour mutualiser les charges.
Ce sont les urgentistes pour les urgences externes et les réanimateurs pour les malades les plus sévères en interne, qui assurent le plus lourd de la permanence des soins. Ces dernières disciplines sont organisées sous forme d’emplois postés fonctionnant 24 h sur 24, par équipes.
Par ailleurs, des maisons médicales de garde fonctionnant avec les médecins libéraux se sont ouvertes aux portes d’un certain nombre d’établissements, et avec leur concours, pour accueillir les malades les moins sévères.
La pression des gardes pèse essentiellement sur les urgentistes, les anesthésistes, les obstétriciens et certains chirurgiens.
S’agissant de ces derniers, la spécialisation de plus en plus poussée – la France reconnaît un
nombre plus élevé de spécialités (46) que ses voisins – contribue à multiplier le nombre d’équipes
et ne facilite pas la mutualisation des gardes
Le risque juridique est concentré sur certaines têtes
Parmi les arguments qui contribuent à pousser aux restructurations, l’existence d’un défaut
de la sécurité sanitaire est souvent évoquée. A l’occasion d’un accident, le directeur de l’ARS peut proposer une fusion d’un établissement de faible taille avec un autre établissement et vouloir fermer le petit service mis en cause. En obstétrique par exemple, cet argument a permis dès les années 70 la fermeture des petites maternités qui ne répondaient pas à des normes minimales d’effectifs
Et dans les années 2000 et 2010 ils continuent de fermer des maternités publiques pratiquant parfois plusieurs milliers d’accouchements par an. Le risque sécuritaire, mis en avant sans preuve par le passé, ne peut plus être invoqué. Le vrai motif de ces fermetures, imposées seulement aux établissements publics, est ailleurs. |
1.2.4. La concurrence entre secteur public et privé est vive en chirurgie, où elle suscite de ce fait des stratégies défensives de la part des EPS
s’est exercée différemment :
- en obstétrique, la concurrence entre le secteur public et parapublic d’un côté et le secteur privé commercial d’un autre côté a diminué, par recul du secteur privé : les exigences d’effectifs plus étoffés, les nouvelles normes d’équipements et de matériels, les nouveaux tarifs d’assurance ont renchéri fortement les coûts de fonctionnement des maternités ; le secteur privé commercial a désinvesti progressivement ce domaine, considérant qu’au-dessous de 1 200 à 1 400 accouchements, la rentabilité n’était plus assurée ;
- en chirurgie, le secteur privé occupe une place majoritaire avec 56 % des séjours (3,3 millions) avec une activité plus homogène que le secteur public, une durée de séjour moyenne plus courte mais pour une population globalement moins sévère ; la DREES a pu constater en 2011 que la chirurgie publique avait récupéré des parts de marché relatives par suite de la baisse du nombre de séjours en clinique privée (notamment dus aux appendicectomies, amygdalectomie et drains transtympaniques) ;
le secteur privé reste largement majoritaire en chirurgie ambulatoire, où il continue à se développer malgré un rattrapage du secteur public ;
- en médecine, le secteur privé commercial progresse, mais reste minoritaire : le secteur public domine l’offre de soins médicale avec 82 % des lits et 70 % des places de médecine ;
l’activité des cliniques privées se concentre sur des activités relativement techniques, notamment interventionnelles, en gastro-entérologie (endoscopies), néphrologie et cardiologie (cathétérismes, poses de stent, pace maker…) ; par ailleurs, elles s’intéressent de plus en plus à la cancérologie ; à l’inverse, les séjours en pneumologie, endocrinologie, hématologie et neurologie sont presque l’apanage du secteur public et/ou PSPH20 ; il y a donc peu de concurrence sur une majorité des activités médicales.
[69] Au total, depuis plus de trente ans, les contraintes ont été très fortes en obstétrique où les besoins de sécurité étaient imparables ; elles ont été plus ambivalentes en chirurgie, et quasiment inexistantes en médecine, à quelques exceptions près (cancérologie). On verra plus loin que ce phénomène n’est pas sans incidence sur l’importance des mouvements de restructuration, et notamment de fusions et de fermetures, dans chacun de ces secteurs d’activité.
2. LES FUSIONS HOSPITALIERES SONT PRESENTEES COMME DES LEVIERS DE RESTRUCTURATION MAIS L’INTERET THEORIQUE DE CES OPERATIONS EST LOIN D’ETRE UNIFORMEMENT DEMONTRE
Face aux nombreuses évolutions auxquelles les gestionnaires hospitaliers ont à faire face, l’augmentation de la taille des structures hospitalières, notamment par le biais de fusions, peut apparaître comme une réponse adaptée pour améliorer leur efficience, leur attractivité ou leurs performances.
Dans certains cas et sous certaines réserves, l’augmentation de la taille d’un établissement hospitalier peut conduire à une amélioration de ses performances. Il ne s’agit pas d’une règle générale. Au-delà d’un certain seuil de capacité, les données et études disponibles témoignent plutôt des inconvénients de la grande taille.
2.1. Les fusions et la grande taille ne sont pas toujours bénéfiques dans le secteur hospitalier
2.1.1. Dans l’entreprise et à l’hôpital, les fusions présentent théoriquement des avantages
Les fusions participent de la croissance externe, qui est l’une des trois formes de croissance dans la théorie du développement des entreprises, aux côtés de la croissance interne et de la croissance conjointe (alliances). Les objectifs des entreprises pour se lancer dans de telles opérations reposent tous sur l’idée que, étant plus grand que les entités qui l’ont formé, le nouvel ensemble sera de ce fait plus performant (économies d’échelle, accès à des financements plus importants, capacité à attirer les talents, effets d’apprentissage…)
Les études disponibles montrent l’impact positif qu’une activité importante peut avoir sur la qualité des soins dispensés, au niveau de l’établissement (effet-équipe) comme au niveau des praticiens eux-mêmes (effet-expérience), mais l’apport d’une augmentation de taille n’agit pas de façon mécanique et cesse de s’observer au-delà d’un certain volume.
Ces éléments ont conduit les pouvoirs publics à lier l’autorisation d’ouverture de services à un seuil minimal d’actes à réaliser sur l’année22. Ces décisions ont été un puissant facteur d’incitation à la restructuration, conduisant à la fusion des petits établissements entre eux ou à la reprise de leur activité par un établissement plus grand (en obstétrique notamment).
L’effet-taille a également été mis en avant comme facteur d’amélioration des performances économiques des établissements hospitaliers, grâce aux économies d’échelle et aux gains de mutualisation qu’il permettrait d’obtenir.
Si pour les gestionnaires de cliniques privées, la fusion est un outil de prédilection pour rationaliser leur offre sur un, leur modèle d’intégration à grande échelle est plutôt celui du groupe, qui associe la fusion d’un certain nombre de fonctions essentielles au niveau central (stratégie, financement, investissement, contrôle de gestion, recrutement et gestion des principaux cadres) et le maintien d’un autonomie plus ou moins large pour les entités absorbées en ce qui concerne leur gestion hospitalière proprement dite.
L’expérience montre que, au-delà d’un certain seuil, l’effet-taille devient négatif : l’augmentation de sa taille augmente ses coûts unitaires ou dégrade ses performances, le processus de fusion étant par ailleurs lui-même générateur de surcoûts ou dysfonctionnements divers.
2.1.2. Dans la réalité, le bilan des fusions d’entreprises est plutôt mitigé
Les études consacrées aux fusions d’entreprises dans la littérature managériale dressent un bilan en demi-teinte de ces opérations. Elles s’accordent sur deux points : un nombre significatif de fusions échoue et, dans une proportion plus large encore, la fusion ne semble pas avoir substantiellement amélioré la situation du nouvel ensemble par rapport aux autres entreprises du secteur.
Trois types de causes qui peuvent expliquer l’échec d’un projet de fusion : des raisons de logiques stratégiques (la cible à fusionner a été mal choisie), des raisons managériales (l’intégration a été mal gérée), des raisons financières (la cible à fusionner présente un coût trop élevé). Ces différentes raisons mettent en exergue trois éléments importants dans l’analyse des fusions,
- la grande taille n’est pas un but en soi : dans beaucoup de fusions, les organisations de grande taille génèrent en effet des coûts qui leur sont propres (fonctionnement du siège, coûts des dispositifs de supervision et de contrôle, enjeux de gestion des ressources humaines, systèmes d’information, etc.), tout en étant menacées de risques particuliers liés à leur complexité (bureaucratisation, manque de lisibilité de la gouvernance, etc.)
- la fusion doit s’inscrire dans un cadre stratégique solidement étayé, notamment sur le plan financier : si la fusion s’effectue à des conditions qui aboutissent à dégrader sensiblement la rentabilité des structures ou qui interdisent de l’améliorer, sans apports sur d’autres plans (accessibilité, maintien ou développement d’une offre à tarif opposable…), les surcoûts de l’opération en excèdent les gains ;
- les facteurs humains et managériaux sont importants : ceux-ci jouent dans la phase d’intégration proprement dite comme sur le moyen/long terme, de nombreuses fusions échouant parce que les cultures d’entreprise n’ont pas su évoluer pour tenir compte l’une de l’autre ; parmi ces facteurs humains figurent également les motivations des dirigeants qui, dans certains cas, pourraient engager leur entreprise dans des projets de fusion pour des raisons liées à leur propre intérêt : maximisation de leur rémunération, amélioration de leur stature extérieure, volonté de « bâtir un empire » .
.2.1.3. Les inconvénients de la grande taille ne doivent pas être minorés à l’hôpital
si l’existence d’économies d’échelle paraît démontrée pour les structures de petite taille, ce qui peut valider la pertinence de stratégies de regroupements les concernant, cet effet tendrait à s’inverser au-delà d’une certaine taille, qui reste difficile à évaluer mais dont les données médico-économiques existantes laissent penser qu’elle devrait être inférieure à celle des structures de très grande taille du système hospitalier français.
Un coin du voile se lève. Les publications précédentes s’efforçaient de démontrer les « faiblesses » des petites structures pour mieux les supprimer. Maintenant que le but est pratiquement atteint de ce côté, on entend mettre l’accent sur les « inconvénients » des grosses structures pour organiser leur démantèlement. Le recul du service public qui ne manquera pas d’en résulter profitera à nouveau au secteur privé à but lucratif. |
2.1.3.1. L’existence de déséconomies d’échelles
L’effet-taille à l’hôpital : les enseignements de deux revues de littérature internationale
Université d’York, 1997 : « des économies peuvent être réalisées par le seul jeu des économies d’échelle jusqu’à 200 lits, et il est probable que les très grands hôpitaux (plus de 600 lits) ont un fonctionnement inefficient, qu’ils peuvent néanmoins compenser grâce à d’autres avantages ».
M. Rosko, 2002 : « si les estimations situent le coût minimal moyen d’un hôpital à long terme entre 150 et 900 lits, la plupart des études suggère que ce coût moyen est minimal autour de 200 à 300 lits ».
Admirables précautions de langage : « Il est probable que» dans la première citation et « la plupart des études suggère » dans la seconde. Les » enseignements » de ces deux revues n’ont pas empêché le ministère ni de s’engager dans une politique de concentration par suppression partielles ou totales des plateaux techniques des petits hôpitaux publics, ni aujourd’hui encore de continuer dans cette voie par le biais des ARS. |
En ce qui concerne la France, les éléments médico-économiques disponibles montrent que les établissements de grande taille ne sont pas ceux dont la situation est la plus favorable, ni en termes de coûts moyens de production, ni en termes d’équilibre financier global.
Les données financières 2009 reprises dans le rapport sectoriel de la FHP montrent que les plus petites cliniques (CA<10 M€) demeurent les plus rentables, avec les cliniques dont le CA est situé entre 30 et 40 M€.
En revanche, les cliniques au CA intermédiaire, ou au CA supérieur à 40 M€ ont une rentabilité économique inférieure de moitié à celle de ces deux classes. Ces chiffres expliquent probablement pourquoi, dans le monde des cliniques, on n’observe pas de « course à la taille » pour les établissements eux-mêmes – une clinique de 200 lits étant déjà considérée comme de grande taille par la fédération de l’hospitalisation privée (FHP).
Dans le secteur public, le cabinet Price Waterhouse Coopers (PwC) a réalisé en 2010 pour la DGOS une étude cherchant notamment à mesurer l’impact de l’effet-taille sur les coûts de production des établissements anciennement financés par dotation globale. Les chiffres recueillis par PWC laissent deviner une structure d’évolution des coûts avec présence d’économies d’échelle dans les établissements les plus petits et de déséconomies d’échelle au-delà d’un certain niveau d’activité qui semble assez bas (recettes de l’assurance maladie comprises entre 28 et 41 M€30).
Les derniers éléments sur la rentabilité économique des EPS montrent que le degré de bonne santé économique des hôpitaux publics semble inversement proportionnel à leur taille, tant en niveau absolu qu’en fonction de la proportion d’établissements de la catégorie en déficit : les taux de rentabilité les plus élevés s’observent dans les petits établissements – hôpitaux locaux (2,3 %) et petits CH (0,9 %) –, qui sont également ceux où la proportion d’établissements déficitaires est la moins forte (21 % pour les HL, 29 % pour les petits CH).
A l’inverse, les établissements les plus en difficultés (selon ces deux critères) sont aussi les plus gros, les CHR, dont la rentabilité est de -0,9 %, avec 60 % de structures en déficit, même si leur situation s’est améliorée en 2010, au contraire de celle des CH grands et moyens.
Ces chiffres doivent cependant être pris avec précaution, tout d’abord parce qu’ils reposent sur des données comptables qui ne sont pas complètement fiables, mais aussi (et peut-être surtout) parce que la corrélation qu’ils font apparaître ne démontre pas l’existence d’un lien de causalité entre grande taille et mauvaise santé financière, celle-ci pouvant être liée à d’autres phénomènes comme le statut des différents établissement au regard de la convergence T2A, l’effet des MIGAC et MERRI ou les différences de case-mix entre les établissements. Par ailleurs, ces études ne mettent pas en évidence d’autres problématiques propres de la grande taille, qu’il serait pertinent d’intégrer pour affiner l’analyse : ainsi par exemple la problématique des pôles d’excellence nationaux (par exemple pour les grands brûlés), qui requièrent une certaine taille critique pour entretenir des compétences extrêmement pointues, ou, à l’inverse, les effets déshumanisants sur les patients de structures trop grandes et perçues de ce fait comme impersonnelles.
2.1.3.2. L’introuvable effet de gamme
Les études sont en revanche nettement moins claires sur la question des économies de gamme, c’est-à-dire sur les gains qu’un établissement pourrait réaliser en mettant en synergie ses différentes activités, soit dans le cadre d’une stratégie de diversification (entretien d’une large gamme de spécialités afin de développer des synergies entre elles), soit dans le cadre d’une stratégie de spécialisation (positionnement privilégié sur certains créneaux spécifiques),
En ce qui concerne les établissements de santé français, les analyses conduites sur leurs données médico-administratives ne permettent pas de trancher cette question. Tout juste peut-on relever que la diversification semble plus coûteuse que la spécialisation, mais ce constat peut être lié à la sévérité plus lourde des cas traités dans les structures diversifiées.
2.2. Les fusions ne peuvent pas être l’unique outil des restructurations hospitalières
Parce qu’elles ont un impact direct sur le nombre d’établissements de santé, les fusions sont l’outil le plus symbolique du mouvement de restructurations hospitalières. Mais le bilan mitigé des fusions d’entreprises et les limites de l’effet taille à l’hôpital doivent inciter à une certaine prudence dans l’utilisation de cet outil.
Le système français de régulation du système hospitalier associe deux types de leviers : la tarification et la planification.
Au niveau des établissements, le levier principal est désormais économique : la tarification à l’activité, par le lien direct et immédiat qu’elle crée entre leurs ressources et leur activité, donne davantage de responsabilités au directeur dans la définition du positionnement de son établissement dans l’offre locale, comme dans l’optimisation de ses coûts.
A travers la gestion des autorisations, l’ARS reste l’autorité décisionnaire in fine pour toutes les restructurations se traduisant par une évolution des capacités ou des activités des établissements. Elle peut également corriger certains effets de la T2A par le biais des dotations qu’elle gère encore (MIGAC, MERRI…). Elle a une responsabilité vis-à-vis des hôpitaux publics déficitaires, par le biais des contrats de retour à l’équilibre.
Ainsi les prescriptions que les ARS font peser par le biais du PRS, qu’elles peuvent imposer, et l’incertitude de l’avenir qui en découle pour certains services ou établissements enferment les responsabilités des directeurs dans un cadre contraint et font disparaître les marges de manœuvre que les besoins locaux pourraient offrir alors que les personnels, les élus et les usagers sont , de fait, tenus à l’écart des stratégies et des choix qu’ils devront subir. L’affectation des dotations et leur niveau peuvent en outre être dictés par le but poursuivi par l’ARS et venir aggraver les contraintes pesant sur un service ou un établissement |
2.2.1.2. Les objectifs nationaux restent généraux et peu opérationnels
La Cour des comptes a constaté un certain délitement de la doctrine ministérielle en matière de restructurations hospitalières par rapport à l’impulsion initiale de 1996, illustré par trois phénomènes :
- le manque de suivi des opérations de restructuration au niveau national,
- les conflits de priorités entre les différents chantiers de réformes à appliquer par les établissements (RTT, T2A, nouvelle gouvernance, Hôpital 2007, plan cancer…) ;
- les « signaux contradictoires » adressés aux ARH par le ministère.
Ainsi, la circulaire de cadrage des schémas régionaux d’organisation des soins (SROS) désormais intégrés dans les projets régionaux de santé (PRS) des ARS33 n’évoque pas la situation des établissements en déficit, ni de façon plus générale le lien qui existe entre la planification territoriale et l’équilibre financier des établissements, alors que ces deux logiques sont liées et rétroagissent l’une avec l’autre, sur le plan du fonctionnement comme sur le plan de l’investissement.
Les textes généraux publiés par le ministère, et notamment la circulaire SROS/PRS précitée, appellent explicitement à « la poursuite des restructurations », mais ils en expliquent peu les conséquences pour les établissements, et les mesures d’accompagnement nécessaires à leur mise en place.
L’accompagnement des restructurations est peu dans les documents produits par le ministère, alors que certaines mesures peuvent modifier sensiblement les conditions de travail ou de rémunération des personnels, et ne sauraient être mises en œuvre sans un accompagnement spécifique, voire des mesures de compensations temporaires. De même, les contraintes territoriales d’accessibilité aux soins peuvent également justifier de déroger aux normes minimales d’activité, ou de mettre en place des moyens exceptionnels (hélicoptère…).
2.2.2. Les fusions ne sont pas forcément le levier le plus pertinent pour conduire les restructurations hospitalières
Opérations lourdes, longues et aux résultats incertains, les fusions doivent être réservées soit aux cas où l’impact de la restructuration à conduire est tel qu’il impose de remettre en cause l’existence même d’un établissement, dont l’activité et les moyens résiduels ont alors vocation à être agrégés dans un ensemble plus vaste, ou aux cas où le fonctionnement de plusieurs structures est à ce point intégré par la mise en commun de moyens qu’il soit préférable d’en unifier complètement la gouvernance.
Dans ces deux situations, la fusion est justifiée du point de vue de la rationalisation de l’offre de soins. Elle doit être soutenue par l’ARS, au besoin de façon contraignante mais ces situations où la fusion paraît indispensable à la rationalisation de l’offre au niveau local sont loin de constituer le cas général. Au contraire, dans la plupart des cas, cette rationalisation suppose plutôt de mobiliser les autres outils à la disposition des régulateurs et des gestionnaires : fermeture ou transfert d’activités sans remise en cause de l’autonomie des établissements, conversion de services, par exemple du court séjour au moyen ou long séjour, etc.
3. DANS LE SECTEUR PUBLIC, LES FUSIONS INTERHOSPITALIERES ONT ETE DES REPONSES PONCTUELLES ET PAS TOUJOURS PERTINENTES AUX GRANDES EVOLUTIONS DES ACTIVITES MCO
3.1. Il y a eu 90 fusions d’EPS depuis 15 ans
3.1.1. Les fusions, comme les restructurations hospitalières en général, ne font pas l’objet d’un suivi de la part du ministère
Fondée sur le répertoire FINESS, les bases SAE et PMSI sont victimes du manque de fiabilité de ce dernier pour le suivi des données d’activité par site et par entité ; de plus, les restructurations n’étant pas identifiées en tant que telles, il n’est pas possible de leur rattacher les mouvements observables d’une année sur l’autre dans l’activité et les capacités des structures hospitalières (a fortiori de leurs différents sites géographiques).
On a donc mis en œuvre pendant 15 ans une politique dont on ne mesurait ni l’impact financier ni les conséquences sur l’offre de soins, sur l’accès aux soins ou sur le développement des territoires. |
Il n’existe plus aujourd’hui au niveau national d’informations consolidées et mises à jour sur les restructurations et recompositions hospitalières. En pratique, pour la période récente, le seul recensement à visée exhaustive des opérations de restructurations hospitalières est celui de NFT (Nouvelle Fabrique des Territoires) pour le compte de Dexia.
3.1.2. Entre 1995 et 2011, les fusions hospitalières ont davantage touché le secteur privé que le secteur public, où 90 fusions entre EPS ont été réalisées sur la période
3.1.2.1. Fusions et fermetures touchent davantage le secteur privé que le secteur Public
L’étude NFT/DEXIA sur 1995/2005 a également complété son approche statistique avec huit monographies de territoires analysant les flux de patientèle avant et après restructuration.
- dans le secteur public, les opérations étudiées portaient sur des établissements de petite taille, relativement rapprochés les uns des autres ; d’après NFT, ces opérations, essentiellement défensives, n’ont pas dégradé la couverture des besoins sur le territoire, les données ne montrant pas de fuite vers les établissements d’un autre territoire ;
Nous savons au contraire que, lorsque l’offre hospitalière a fait l’objet d’un regroupement dans le cadre d’une fusion, le service regroupé, plus éloignés pour une fraction des populations concernées, ne retrouve presque jamais le niveau d’activité total des services existants avant l’opération de fusion. L’augmentation des fuites peut représenter jusqu’à 20% de l’activité d’origine |
- dans le secteur privé, les opérations étudiées ont surtout concerné des établissements implantés dans des grandes villes ; de ce fait, elles n’ont pas dégradé la couverture des besoins territoriaux, mais elles ont pu avoir un effet indirect sur l’offre en fragilisant les établissements des zones périphériques du fait de leur caractère essentiellement offensif.
3.1.2.2. Au sein du secteur public, il y a eu 90 fusions entre EPS depuis 1995, principalement entre deux établissements de taille petite ou moyenne
90 fusions entre EPS, plus de 200 directions communes. Sur les 90 opérations recensées par la mission, 81 concernaient 2 établissements, 8 en concernaient 3 et une seule en concernait 4.
Ces fusions impliquent en majorité des centres hospitaliers, soit qu’ils fusionnent entre eux (dans 60 % des cas), soit qu’ils fusionnent avec une autre structure – centre hospitalier spécialisé (CHS), hôpital local, centre de long séjour (CLS), clinique privée ou PSPH.
Près de 80% des établissements résultant de fusion affichent plus de 200 lits.
Les structures de taille médiane (entre 100 et 200 lits) représentent 16 % des EPS en 2010, mais 28 % des établissements parties prenantes d’une fusion. La mission voit dans cette situation probablement l’effet de la démographie médicale, qui complique les recrutements de personnels médicaux pour les plus petits établissements MCO et les pousse à se rapprocher pour être plus attractifs.
Mais la mission ne mentionne pas le fait que les petits établissements ont été la cible favorite des ARH pendant 15 ans et que celles-ci, faisant peser sur eux une incertitude quant à leur avenir, ont rendu impossibles tout recrutement afin de pouvoir ensuite s’appuyer sur les insuffisances d’effectifs pour justifier les fermetures, fusions et restructurations diverses. |
Dans 55 % des cas, le rapport entre le nombre de lits d’hospitalisation des structures fusionnées est supérieur à 1,5. Les fusions réellement « égalitaires » (cas où le rapport de taille entre les deux établissements est situé entre 0,8 et 1) restent très minoritaires (14% des cas),
3.2. Les différentes disciplines MCO ne se sont pas restructurées à la même vitesse et de la même façon
3.2.1. Le processus de transformation des maternités est bien avancé
3.2.1.1. Les fermetures de maternités ont été nombreuses et la taille finale des maternités a augmenté
Le nombre de maternités est passé de 1 369 en 1975 à 1 010 en 1985, 814 en 1996, 779 en 1997, 576 en 2007, 554 en 2008, soit une baisse pratiquement linéaire pendant 30 ans, alors même que le nombre de naissances ré-augmentait43. Parallèlement le nombre de lits d’obstétrique a été divisé par deux. Le taux d’utilisation des lits de maternité a donc fortement augmenté, passant de 22 accouchements /lit/an en 1975 à 46/lits/an fin 2008. Selon l’étude NFT, près de 180 opérations de recomposition ont eu lieu en obstétrique entre 1995 et 2005. Elles se sont soldées par 126 fermetures de services de maternité et par une quarantaine de regroupements.
La DREES a constaté pour sa part que la taille des maternités augmentait avec le niveau de spécialisation : en 2008 une maternité de niveau 1 effectuait en moyenne 877 accouchements, une maternité de niveau 2 en moyenne 1721 et une maternité de niveau 3 environ 2760.
Dans le secteur public, la fermeture a touché des services d’hôpitaux de petites villes (Exemples : Guebwiller, la Réole, Valognes, Loudéac, Luxeuil, Mazamet, Bourganeuf, Luçon, Moutiers, Barbezieux) ou exceptionnellement de banlieue (Courbevoie).
Un tiers des établissements privés ont disparu mais la taille moyenne des survivants a augmenté.
. D’une façon générale, l’hospitalisation privée commerciale a désinvesti l’obstétrique pour se déployer en chirurgie. Actuellement entre 60 et 90 % des accouchements selon les régions se font dans le secteur public.
3.2.1.2. Les mortalités néo-natale et maternelles ont diminué au prix d’une augmentation des coûts
Plus de 80 % des accouchements se déroulent sans complication. La majorité d’entre eux aurait pu
s’effectuer dans des maternités de niveau 1 mais seuls 33 % des accouchements se sont ainsi déroulés dans des maternités de niveau 1 en 2007 et cette proportion a encore diminué en 2011.. Or ces dernières disposent de moins de lits que les maternités de niveau 2 et cette tendance s’accentue : ce sont avant tout les maternités de niveau 1 qui disparaissent.
La logique implicite du système français pousse les femmes à accoucher dans des maternités de niveau élevé de plus en plus techniques. Il est clair qu’une telle tendance n’est pas en faveur d’une réduction des coûts des établissements.
C’est surtout la conséquence logique du discours officiel qui a, pendant des années, discrédité sans fondement les petites maternités sur le terrain de la sécurité pour mieux les fermer. Les suppressions de lits et la réduction des durées moyennes de séjour qui en ont résulté se traduisent aujourd’hui par la détérioration de certains indicateurs. (mentionnée plus loin par la mission elle-même |
De plus cette tendance n’est pas forcément cohérente avec l’idée selon laquelle « plus on fait un acte, plus on sait le faire, et meilleur on est » Les données de l’ATIH montrent en effet que la charge annuelle en accouchements va de 0 à 160 pour un obstétricien ou une sagefemme (les deux types de personnel ne sont pas distingués), mais que ce n’est pas forcément dans les plus gros établissements (par exemple les CHU qui possèdent des maternités de niveau 3) que l’activité individuelle est la plus grande. L’expérience passée n’est pas non plus identique : les CHU emploient beaucoup de personnels jeunes en fin de formation initiale et ce ne sont pas forcément les PU-PH qui réalisent les accouchements. Cette question demeure mal réglée.
3.2.2. La chirurgie pose des problèmes plus complexes
3.2.2.1. Les seuils minimaux d’activité sont difficiles à définir en pratique
Plusieurs experts, ainsi que le conseil national de la chirurgie et l’académie de chirurgie ont demandé la fixation d’un seuil minimum d’activité de « 2 000 interventions par an » mais ce nombre résulte de l’agrégation d’activités disparates tant par le domaine que par l’expérience des chirurgiens qui les réalisent. Au-dessous de cet agrégat, il est trop rapide d’affirmer que la chirurgie est forcément de mauvaise qualité.
Le Center for Reviews and Dissemination de l’université d’York, qui s’est livré en 1996 au dépouillement systématique de plus de 200 études, avait conclu que « l’idée largement répandue selon laquelle plus on soigne de malades et meilleurs sont les résultats se heurtait à plusieurs démentis »
. S’il est possible en effet que l’on fasse – en chirurgie comme ailleurs – plus aisément quelque chose qu’on fait souvent, plusieurs problèmes se posent lorsqu’il s’agit de fixer des seuils :
- le volume minimal d’activité requis s’applique-t-il au service dans son ensemble ou aux professionnels (chirurgien, anesthésiste, IBODE, IADE, infirmier) ?
- le volume d’activité doit-il être comptabilisé intervention par intervention, par domaine pathologique (cancer du colon) ou par discipline (chirurgie digestive) ?
- l’expérience antérieure des professionnels est-elle prise en compte (une personne qui a déjà accompli mille fois la même intervention a des chances d’être meilleure qu’une personne qui démarre cette activité, même si les deux personnes réalisent le même nombre d’actes au cours l’année évaluée) ?
En 2009, dans le projet de décret « relatif aux conditions d’implantation applicables aux activités de soins de médecine et de chirurgie », l’autorisation en chirurgie devait être subordonnée à une activité minimale à « 1500 séjours hospitaliers avec intervention chirurgicale ». Devant les réactions des représentants des petits établissements publics, , le ministère a renoncé à ce texte.
Il est normal toutefois que, pour des raisons de rationalité budgétaire, la tutelle souhaite fermer la nuit un bloc opératoire qui n’est utilisé qu’une nuit sur dix et ne veuille pas maintenir des postes dans lesquels les agents n’ont pas d’activité mais l’argument de dégradation de la qualité doit être employé à bon escient.
Sous réserve d’une prise en charge alternative respectant les conditions légales en termes de sécurité et de temps d’accès |
3.2.2.2. Les blocs opératoires sont trop éparpillés
En 2008 La MEAH a constaté à l’occasion d’une étude réalisée dans 850 blocs opératoires de 352 établissements publics de santé que le temps de vacation offert (TVO) était inférieur à 27 heures par semaine dans un quart des blocs étudiés et que plus le nombre de salles du bloc opératoire était important, plus le taux d’ouverture augmentait. Toutefois, le taux d’occupation (temps réel occupation des salles/TVO) est inférieur à 58 % dans un quart des blocs.
L’étude montre au final qu’il existe un fort suréquipement en blocs opératoires publics
Une enquête instructive a été lancée en 2011 par le conseil national de la chirurgie (Pr BARRAL) pour analyser « la permanence des soins chirurgicaux dans le département de la Loire » en 2011 montre que l’activité opératoire est de 6,2 opérations en 6 mois par chirurgien d’astreinte et ne représente que 3,2 % de l’activité globale. Les auteurs conseillent la fermeture de plusieurs blocs opératoires (au moins) la nuit entre 20 ou 22 h et 8 h et la réduction du nombre d’astreintes rétribuées. La permanence des soins chirurgicaux peut donc se recentrer dans un nombre d’établissements plus petit.
La conférence nationale des présidents de CME avait montré cependant en 2008, après un bilan de 9 années de fermetures en chirurgie, qu’une meilleure efficience ne pouvait résulter que de la fermeture complète des blocs opératoires (jour et nuit), suivie du regroupement des moyens sur un autre site.
Ce paragraphe est un réquisitoire à charge contre les services de chirurgies générales des petits hôpitaux publics. Comme tel, il ne met en évidence que certains aspects du problème et le fait de façon orientée. |
3.2.2.3. L’implantation d’unités de chirurgie ambulatoire n’est pas une solution à banaliser mais les principes sur lesquels elle s’appuie doivent au contraire être généralisés à la chirurgie tout entière
La chirurgie ambulatoire fait l’objet d’une promotion des pouvoirs publics, car la surveillance d’un malade opéré en ambulatoire nécessite moins d’effectifs paramédicaux et mobilise moins de ressources. Il faut donc encourager son développement, par exemple en étendant la liste des actes mis sous accord préalable (MSAP cf. annexe 12). Toutefois certains malades ne peuvent en bénéficier, soit pour des raisons médicales, soit pour des raisons sociales ou géographiques. et on transfère sur l’entourage (et surtout les femmes) une part de la charge, sans demander son avis ni l’informer clairement.
En revanche, la chirurgie ambulatoire repose sur des règles strictes : ponctualité des blocs opératoires, coordination maîtrisée des équipes multidisciplinaires, information du malade, application de bonnes pratiques, anticipation de la douleur du malade et traitement préventif de celle-ci, suivi téléphonique. . Plutôt que d’en faire une modalité à part, il faudrait que ces règles soient appliquées à toutes les formes de chirurgie traditionnelle, pour réduire la durée de séjour et ses effets néfastes pour le malade.
La chirurgie ambulatoire n’est pas la solution toute trouvée pour les petits établissements hospitaliers dans lesquels les chirurgiens n’ont pas d’activité non programmée ni de clientèle personnelle. ] Les constats faits par la mission montrent que son implantation peut réussir, en cas de regroupement ou de fusion, lorsque le gros établissement propose son aide, gère le programme et organise les équipes en tout ou en partie.
Et ça continue. Si on en croit l’IGAS, les petits établissements publics ne seraient pas capables d’organiser un service de chirurgie ambulatoire et ne pourraient le faire qu’avec l’aide d’un établissement plus gros. |
Mais cette modalité a aussi des inconvénients, dans la mesure où elle laisse en place les blocs opératoires sur les deux sites, et empêche le regroupement sur un seul site d’un personnel compétent et rare : non seulement les chirurgiens, mais les IBODE, les IADE et les anesthésistes.
Elle doit donc être réservée aux cas où le gros établissement est lui-même au maximum de ses capacités internes.
En pratique l’ouverture de la chirurgie ambulatoire dans le cadre d’une fusion est souvent présentée comme un palliatif à la fermeture du service de chirurgie traditionnelle, palliatif qui se révèlera très éphémère, avec ultérieurement la fermeture de la chirurgie ambulatoire justifiée le plus souvent par la détérioration de la situation financière de l’établissement, détérioration qui est en fait la conséquence des pertes de recettes faisant suite à la fermeture de la chirurgie conventionnelle. |
3.2.3. La médecine est l’oubliée des restructurations de court séjour, alors qu’elle occupe une place majoritaire à l’hôpital public et que les inadéquations y sont fréquentes
Le secteur public domine sans conteste l’offre de soins médicale avec 82 % des lits et 70 % des places de médecine. Il n’assure cependant que 75 % des séjours de plus d’un jour et 56 % des hospitalisations de moins d’une journée.
L’activité des cliniques privées se focalise sur des activités relativement techniques, notamment interventionnelles, en gastro-entérologie (endoscopies), néphrologie et cardiologie (cathétérismes, poses de stent, pace maker…). Par ailleurs, le secteur privé commercial cherche à mieux accueillir la cancérologie. A l’inverse, les séjours en pneumologie, endocrinologie, hématologie et neurologie sont presque l’apanage du secteur public et/ou PSPH.
L’« enquête nationale pour l’évaluation des inadéquations hospitalières » – demandée à la SANESCO par la DGOS et publiée en 2011 – a été menée en mars 2010 dans 166 services répartis dans 73 établissements publics de 11 zones géographiques.
Cette étude a conclu que « les admissions non justifiées sont beaucoup plus fréquentes en médecine qu’en chirurgie », Les « admissions inadéquates » se situent entre 3 et 10 % selon le type d’établissement et les
« journées inadéquates » entre 19 et 25 %. L’enquête observe que «Les principales raisons invoquées pour expliquer une inadéquation sont une demande expresse du médecin de ville, l’attente d’un avis diagnostique interne à la structure, l’impossibilité transitoire du retour à domicile, la décision du patient ou de son entourage, l’absence de place d’aval, le risque de non-observance des prescriptions, l’attente d’un avis de collègues ou d’un avis externe à la structure, l’attente d’un examen… ».
Au bout du compte, les inadéquations sont le plus souvent expliquées par un problème d’organisation interne (attente d’un examen complémentaire ou du passage du médecin senior du service ou d’un service voisin), par l’attente d’une structure d’aval ou par les relations avec le médecin traitant ou le malade.
Sur tous ces aspects, une réflexion et une aide méthodologique (ANAP par exemple) serait souhaitable pour que les services de médecine deviennent plus performants.
3.3. Les fusions et les regroupements ont des résultats très contrastés
3.3.1. L’évaluation des fusions est malaisée
De fait, dans les cas étudiés, aucun indicateur de résultat n’a été fixé a priori, et donc suivi. Un tel travail aurait nécessité une réflexion en amont, dans une démarche impliquant si possible les différentes parties prenantes. La définition d’indicateurs implique de déterminer au préalable les objectifs attendus de la fusion, ce qui est loin d’être systématique. Du fait de cette carence dans la définition des objectifs et des indicateurs de résultats, les données permettant d’évaluer les fusions sont lacunaires. La comparaison de divers indicateurs avant et après la fusion semble pourtant indispensable : amélioration des indicateurs financiers, hausse de l’activité, maintien voire amélioration de la qualité des soins, conditions de travail satisfaisantes, attractivité des postes, satisfaction des usagers, attraction ou fuite de la patientèle, sont autant de dimensions qui nécessiteraient un suivi attentif.
Un deuxième obstacle à l’évaluation des fusions tient aux délais.
Ces réorganisations (fermetures ou transferts de services, restructurations immobilières, rationalisation de plateaux techniques…) s’étendent souvent sur une période si longue que toute comparaison entre situation initiale avant fusion et situation finale après fusion paraît illusoire.
Un troisième obstacle découle du fait que rien ne permet d’affirmer que la qualité ou l’efficience auraient été différents avec d’autres solutions.
3.3.2. Beaucoup de projets de regroupement sont un échec
3.3.2.1. Les échecs s’expliquent parfois par des facteurs structurels
Six facteurs de risques ressortent plus particulièrement de l’examen de fusions passées.
Premier élément : un temps de trajet important (supérieur à 45 minutes) entre les deux établissements, car cette situation nuit à l’organisation des activités (transport de patients, réunions sur les deux sites induisant un temps de trajet important), risque de susciter des réticences des personnels, notamment médicaux, à exercer sur le site éloigné de leur lieu de travail habituel.
Deuxième élément : si les deux hôpitaux se situent sur des bassins de vie trop différents, comme les hôpitaux de Romans et Valence dans l’exemple précédent, et que les patients ont par ailleurs la possibilité de se faire soigner dans d’autres structures, leur fusion est à la merci d’une augmentation du taux de fuite, qui interdira au nouvel établissement de récupérer l’activité de ses deux composantes.
Troisième élément : la mauvaise santé financière des établissements parties prenantes de la fusion est un élément de complication, a fortiori lorsque tous les établissements sont en difficulté financière.
Quatrième élément : les deux structures doivent trouver des complémentarités d’activité, et ne pas être en concurrence, ou totalement indépendantes l’un de l’autre.
Cinquième élément : la fusion entre deux établissements moyens ou grands de taille voisine apparaît comme une opération particulièrement difficile, alors que la fusion d’un « petit » établissement avec un « gros » semble poser moins de problèmes. Au-delà d’une certaine taille, la fusion entre égaux semble ainsi maximiser les inconvénients de la grande taille : complexité de la gouvernance, déséconomies d’échelle, difficultés managériales et de conduite de projet dans un environnement particulièrement complexe et sensible, etc.
3.3.2.2. Un accompagnement au changement défaillant ralentit, voire empêche la réussite d’un projet
L’implication managériale est déterminante pour assurer la conduite du projet de fusion. Elle se traduit à différents niveaux.
Des objectifs clairs, notamment d’efficience, doivent être définis et affichés de manière transparente par les directions d’établissement,
le directeur de l’hôpital fusionné doit avoir une légitimité incontestée,
le changement doit être conduit avec méthode, dans la transparence, et en associant l’ensemble des acteurs aux moments opportuns. Une bonne communication vis-à-vis du personnel, des élus, de la population est indispensable,
le manque d’accompagnement social du personnel est un facteur de blocage important. L’incertitude sur les conditions de travail doit au contraire être minimisée dès que possible.
La tutelle, tant régionale que nationale, a également un rôle important à jouer aux côtés des équipes hospitalières dans la conduite des projets de fusion, parce qu’elle est en charge de la stratégie de réorganisation de l’offre de soins, parce qu’elle a vocation à accompagner et soutenir les établissements qui fusionnent, parce qu’elle peut jouer un rôle de capitalisation et de diffusion de méthodes et d’expériences. Une éventuelle carence est de nature à obérer la réussite du projet de fusion.
Or, au niveau national, aucun suivi ou évaluation des opérations de fusion n’est mené. De ce fait, aucune capitalisation sur les expériences considérées comme réussies ou en échec n’est possible.
D’une manière générale, dans la mesure où l’ARS est directement responsable de la politique des restructurations hospitalières en région, elle a un rôle essentiel à jouer dans la préparation des fusions, comme dans leur accompagnement une fois qu’elles ont été décidées mais une fusion ou un projet Imposé(e) par un DG d’ARS augure mal de la réussite de l’opération, si les raisons de cette évolution ne sont pas intégrées par les acteurs locaux.
3.3.2.3. Un contexte défavorable peut faire échouer un regroupement
L’opposition de tout ou partie du corps médical, des élus, et l’absence de « fait générateur » reconnu par l’ensemble des acteurs comme rendant nécessaire la fusion constituent trois éléments de contexte introduisant un degré de complexité supplémentaire dans la conduite d’une fusion.
L’opposition de tout ou partie du corps médical
La pertinence et la valeur ajoutée d’une fusion se jugeant à la capacité qu’elle offre au nouvel ensemble de repenser ses processus, ses organisations et ses moyens, la capacité de la communauté médicale à s’accorder sur une nouvelle organisation pèse lourd dans la réussite ou l’échec d’une fusion.
Ce constat est d’autant plus vrai lorsque les rationalisations consécutives à la fusion ont un impact négatif sur la situation personnelle et financière des personnels médicaux et para-médicaux : par exemple lorsqu’elles se traduisent par la fermeture d’un plateau technique ou par l’unification sur site unique des urgences H24, conduisant à les priver des rémunérations des gardes et astreintes, salaires de nuit, etc., qu’ils percevaient dans l’organisation antérieure ou lorsqu’il n’y a plus de prise en charge des activités multi-sites et des frais de transport
L’opposition des élus
La mobilisation d’élus contre un projet de fusion, même déjà engagée, est un facteur bloquant. Les résistances du personnel en sont renforcées, et les restructurations prévues ne peuvent être menées comme prévu initialement.
Une fois de plus l’IGAS tient les usagers comme quantité négligeable. L’annexe 2 présente la liste des personnalités consultées. On peut y constater l’absence de représentant des usagers alors qu’il existe des associations agréées. |
L’absence d’un fait générateur
Un « fait générateur » d’une fusion permet d’accorder les parties prenantes sur la nécessité d’un rapprochement : situation financière dégradée, difficulté à remplacer un praticien, recomposition de l’offre de soins privée, nécessité de s’étendre sur le plan immobilier…
En l’absence d’un constat partagé établissant une certaine urgence à agir, les facteurs de blocage l’emportent.
3.3.3. Mais certaines, rares, sont très bénéfiques
L’objectif d’une fusion ou d’un rapprochement doit être de rationaliser l’offre de soins sur un territoire donné, en maintenant des soins de qualité, en garantissant un accès aux soins adéquat, sans augmenter le taux de fuite des patients vers des établissements tiers.
Tout d’abord, la pertinence du projet doit faire l’objet d’un consensus le plus large possible, qui est souvent facilité par l’existence de faits générateurs objectifs,
- une situation financière très dégradée ne permettant plus à l’établissement de préserver son
- la difficulté à remplacer un praticien parti pose la question de l’attractivité de l’hôpital, et donc de sa capacité à maintenir tel ou tel secteur d’activité
- la recomposition de l’offre de soins privée.
- la nécessité de réaliser des investissements lourds que l’établissement ne serait pas en mesure
de réaliser seul;
- un important taux de fuite des patients est également de nature à mobiliser les acteurs lorsque les établissements tiers sont faciles d’accès. ;
- le calendrier politique et l’implication des élus locaux peuvent jouer en faveur des rapprochements :
En conclusion, une fusion hospitalière n’est pertinente que si elle vise à améliorer l’efficience de l’offre sanitaire sur le territoire, et y parvient effectivement. Sans être un remède miracle aux différents problèmes rencontrés par les établissements publics de santé, elle peut parfois être un outil efficace au service de cet objectif, mais ne doit être utilisée qu’avec prudence et précaution.
3.4. Dans la conduite des restructurations hospitalières, l’ARS ne doit pas utiliser les fusions et autres modes de rapprochements entre hôpitaux pour déléguer son rôle de régulateur aux gestionnaires d’établissement
la réorganisation de l’offre de soins sur un territoire (compétence de l’ARS) et l’optimisation de la gestion d’un établissement de santé ou la conduite d’un projet de fusion (responsabilité du directeur d’hôpital) ne sont pas des activités de même nature, même si les secondes s’inscrivent dans le cadre tracé par la première.
3.4.1. Le directeur d’hôpital ne peut pas être l’agent de la réorganisation de l’offre de soins au nom de l’ARS
Certains modes d’organisation promus par les ARS peuvent conduire au mélange de ces deux fonctions. C’est le cas lorsque les ARS placent de jure (dans le cas d’une direction commune) ou de facto (dans le cas d’une
CHT) des directeurs d’hôpitaux à la tête d’ensembles composites qu’il leur appartiendrait de réorganiser.
La plupart des CHT n’ont pas vocation à déboucher sur la fusion des établissements qui les composent. Confier dans ce cadre une mission de réorganisation de l’offre publique à un directeur d’établissement présente alors deux risques :
- un risque de conflit d’intérêt;
- un risque d’engorgement , le directeur, accaparé par les missions chronophages que lui imposent à la fois l’animation des multiples structures de l’ensemble qu’il doit piloter et les tâches spécifiques de restructuration sur lesquelles il a été missionné ne pouvant pas consacrer tout le temps nécessaire à sa tâche de direction
3.4.2 la définition et la mise en oeuvre de la stratégie de réorganisation de l’offre de soins relèvent de la responsabilité du régulateur, c’est-à-dire des ARS, et cette mission ne peut être déléguée aux acteurs eux-mêmes.
Les acteurs de terrain doivent évidemment être associés à la préparation des décisions qu’ils auront à mettre en œuvre mais il est de la responsabilité du régulateur de porter le discours et de tracer les perspectives de rationalisation pour les établissements dans le cadre territorial (c’est-à-dire au-delà de leur problématique stratégique propre), puis de leur apporter les outils et moyens dont ils auront besoin pour accompagner la mise en œuvre des décisions.
Curieux raisonnement qui sous-entend que les problématiques locale et régionale sont par nature antagonistes, et qu’entre deux approches divergentes seule celle du DG ARS peut être pertinente, alors que les critères d’appréciation ne sont pas clairement définis et varient d’une ARS à l’autre. |
4. PROPOSITIONS
4.1. Les fusions dans la politique des restructurations hospitalières
Les fusions ne sont pas une fin en soi : elles ne sont que des outils. Elles ne doivent être lancées que si leur intérêt est démontré au regard des objectifs généraux d’optimisation de l’offre de soins que poursuit le régulateur. Encore faut-il que ces objectifs aient été précisément définis.
4.1.1.1. Expliciter et assumer l’enjeu de la restructuration
Pour permettre aux ARS de jouer leur rôle, il est essentiel que le ministère soit plus explicite dans les orientations qu’il leur fixe en matière de réorganisation de l’offre de soins.
La logique et les conséquences des évolutions auxquelles les hôpitaux sont confrontés doivent être davantage explicitées par le ministère. Ainsi, il faut évoquer les perspectives d’évolution de la chirurgie conventionnelle parallèlement à celles de la chirurgie ambulatoire et l’objectif d’amélioration de l’efficience doit être envisagé non seulement à travers l’amélioration de la qualité des soins à coûts constants, mais aussi à travers la diminution des coûts à qualité constante.
Lorsque les restructurations à conduire se justifient d’abord pour des raisons de rationalité économique (comme dans le cas de regroupements de plateaux techniques), il est important de les assumer en tant que telles, l’utilisation d’autres arguments (qualité des soins, etc.) étant alors contre-productive, parce que non fondée. A l’inverse, il peut être possible que des raisons d’intérêt général s’opposent à certaines opérations de rationalisation, au nom, par exemple, de la nécessité de préserver l’accès aux soins dans des zones isolées ; mais il est alors important que les critères de ces exceptions soient explicites et rigoureusement fondés.
Le ministère doit également mieux structurer son discours sur l’articulation entre la logique de financement des établissements et la logique de planification de l’offre de soins, qui sont liées. Il est important que les ARS puissent utiliser les différents outils à leur disposition (autorisations, dotations spécifiques, avis sur les projets d’investissement…) à bon escient, c’est-à-dire en intégrant le fait qu’elles interviennent dans un environnement budgétaire régulé globalement par la T2A, mais aussi que cette logique de financement n’est pas toujours efficiente et qu’il leur appartient parfois d’en corriger les effets grâce à leur pouvoir réglementaire ou financier (ainsi lorsqu’il paraît nécessaire de dépasser l’intérêt financier bien compris de l’un ou l’autre des deux établissements afin de pouvoir conduire à son terme leur rapprochement).
Ce qui revient à dire qu’après avoir associé (ou pas) les acteurs locaux à la préparation des décisions, le DG ARS peut peser sur les données financières pour justifier et imposer des restructurations. La démocratie en matière sanitaire et le simple exercice de la citoyenneté semblent être des concepts étrangers à l’IGAS. |
Enfin, la fourniture d’un accompagnement spécifique aux établissements confrontés aux conséquences des restructurations de l’offre de soins doit être un axe particulier de la politique du ministère, qui doit faire l’objet de moyens et d’une organisation spécifiques.
Recommandation n°1 : Faire des restructurations hospitalières un axe particulier de la politique hospitalière, décliné par secteurs (médecine, chirurgie, obstétrique) et lui dédier des moyens et une organisation spécifiques
Recommandation n°2 : Améliorer la connaissance et le suivi des restructurations hospitalières en améliorant les outils actuels, en sensibilisant les acteurs locaux à leur remplissage et en réinstituant l’observatoire national des recompositions hospitalières auprès de la DGOS.
Il serait intéressant d’éclairer, sur la base de l’étude de cas concrets
- la réalité des gains d’efficience dans les cas de mutualisations (sous toutes leurs formes : coopérations bilatérales, création de structures ad hoc, fusions) ;
- l’arbitrage accessibilité/qualité dans les zones isolées,
- la comparaison entre les pertes de chance liées à un plus grand éloignement des structures de soins et les pertes de chance liées à une moindre qualité des soins du fait de la plus petite taille des structures locales.
Recommandation n°3 : Développer les études sur l’impact des recompositions hospitalières, et notamment des fusions.
Les acteurs locaux doivent fréquemment définir de solutions de reclassement pour les personnels touchés par la restructuration, accompagner des mobilités géographiques ou fonctionnelles, prendre en compte de surcoûts temporaires liés à l’opération. La DGOS doit travailler avec les ARS et les établissements confrontés aux restructurations sur les outils supplémentaires qui pourraient être mis à leur disposition pour mieux accompagner ces mouvements.
Recommandation n°4 : Créer à la DGOS une cellule nationale d’appui aux restructurations, chargées de coordonner l’action du niveau national afin de répondre aux besoins des acteurs locaux. Mobiliser tout particulièrement cette cellule, en liaison avec l’ANAP, sur l’accompagnement méthodologique des fusions.
.L’analyse des fusions amène ainsi à s’interroger sur l’opportunité de « défusions » pour les ensembles hospitaliers les plus importants – a fortiori pour les « groupes » de fait que constituent les assistances publiques (AP-HP, HCL, AP-HM).
Cette interrogation devrait être autant juridique que technique, dans la mesure où, aujourd’hui, il n’existe pas d’outils pour structurer sous la forme d’un groupe un ensemble de sites hospitaliers publics auxquels on souhaiterait donner davantage d’autonomie, sans perdre l’intérêt de la mutualisation sur certains sujets stratégiques (financement, stratégie, etc.).
Recommandation n°5 : Missionner l’IGAS et l’ANAP sur l’optimisation de l’organisation des structures hospitalières de grande taille : quelle organisation juridique et financière des groupes d’hôpitaux publics ? faut-il « déconsolider » les assistances publiques en établissements complètement autonomes, ou dans le cadre d’un modèle de groupe public à inventer ?
la politique des restructurations hospitalières est de la responsabilité des ARS, et ne doit pas être déléguée aux directeurs d’établissement.
Ce principe se traduit par une triple responsabilité pour l’ARS :
- dans sa mission de planification, elle doit analyser les inadéquations dans l’organisation hospitalière sur les territoires de santé de son ressort, et y remédier ;
- dans sa mission de suivi général des établissements, elle doit mesurer l’impact réel des restructurations sur l’offre de soins locale : activité, coûts, taux de fuite, satisfaction des usagers, indicateurs financiers, qualité des soins à partir d’indicateurs préalablement définis avec la direction de l’établissement ;
- enfin, elle doit permettre aux établissements confrontés à de lourdes restructurations d’avoir accès aux mesures d’accompagnement existantes (dont la mission propose par ailleurs de renforcer le nombre et la portée).
Recommandation n°6 : Affirmer le rôle des ARS dans le pilotage des restructurations hospitalières au niveau régional. Adapter leur organisation, le cas échéant, pour leur permettre de mettre en œuvre cette politique au niveau des territoires de santé.
4.1.2.2. Les fusions doivent être promues avec discernement
Parmi les facteurs structurels caractérisant un « bon projet », on peut citer :
- la complémentarité des activités ;
- une faible distance entre les deux établissements (temps de transport inférieur à 45-50 minutes
- la cohérence des bassins de vie,
- des indicateurs financiers pas trop dégradés ;
- la taille des établissements ; la fusion d’un petit hôpital avec une grosse structure est plus aisée, et aboutit plus fréquemment à des restructurations d’activités et d’organisation.
A l’inverse la réussite d’une fusion peut être compromise par la possibilité de recourir à un hôpital tiers (augmentation d’activité difficile en raison d’un taux de fuite important), l’existence d’un déficit important dans l’un des établissements n’est pas nécessairement rédhibitoire, mais l’intérêt de la fusion pour résorber ce déficit doit être démontré. L’existence d’une opposition du corps médical ou de réticences des élus doit également être identifiée par l’ARS, pour le cas échéant tenter d’y remédier.
Recommandation n°7 : Mettre à disposition des ARS une grille d’analyse des projets de fusion envisagés, afin d’identifier les facteurs de réussite et les éventuels obstacles au rapprochement
Recommandation n°8 : Subordonner la mise en place par les ARS d’une direction commune à plusieurs établissements à l’élaboration préalable d’un projet de fusion, ou, à défaut, de restructurations précises à réaliser dans un calendrier déterminé.
La direction commune peut constituer une étape. Elle ne devrait être mise en place que dans le cadre d’un projet de fusion ou de restructuration d’activités défini en amont. Elle doit être identifiée par les différents acteurs comme n’étant qu’une étape transitoire, dans un calendrier établi et partagé. De plus, elle ne pourra être considérée comme effective que si elle se traduit par une réorganisation de l’ensemble de l’administration des établissements, aboutissant à une suppression de doublons.
Recommandation n°9 : Accorder des dérogations aux maternités dont la disparition dégraderait notablement l’accès aux soins.
Il ne reste plus que 13 maternités effectuant moins de 300 accouchements par an et une cinquantaine qui effectuent moins de 500 accouchements par an. La plupart de ces maternités se situent désormais dans des zones relativement isolées d’un point de vue sanitaire. Il serait nécessaire de disposer d’études modélisant, en cas de fermeture du service, la perte de chance des futurs patients par suite d’un allongement important des délais de transport, afin de fixer des seuils pertinents.
on peut considérer qu’un allongement de la durée de transport supérieur à deux heures est inacceptable et qu’il faut bien maintenir un service de maternité, en abaissant les normes exigibles en matière d’effectif permanent de personnel médical et soignant. En outre, il faudrait accorder les dérogations de façon à ce que les gestionnaires disposent d’une visibilité qui leur permette d’assurer une maintenance et des recrutements adaptés.
Il faudrait aussi que la responsabilité pénale des DG ARS puisse être engagée chaque fois que les décisions qu’ils imposent contreviennent aux règles de sécurité ou créent les conditions d’une carence de ces services. |
Recommandation n°10 : Mener une enquête à l’échelon européen sur les moyens d’améliorer les indicateurs médiocres parmi ceux relatifs à l’obstétrique.
Les hémorragies du post-partum provoquent en France plus de morts maternelles que chez certains de nos voisins. L’étude des méthodes et des résultats des autres pays européens pourrait éventuellement éviter de raisonner uniquement par concentration des femmes dans des maternités de niveau 3, comme c’est la tendance naturelle dans notre pays.
Recommandation n°11 : Organiser un pyramidage des activités et des contrôles plus cohérent.
4.2.2. Donner des règles de conduite claires en matière de réorganisation chirurgicale
Recommandation n°12 : Assurer dans de bonnes conditions la permanence des soins chirurgicaux la nuit et le week-end en réduisant le nombre de sites chirurgicaux de garde ne fonctionnant que très rarement.
Il s’agit de diminuer le nombre de sites de garde de façon à ce que chaque site chirurgical dispose de moyens en personnels suffisants pour assurer une qualité de vie correcte aux professionnels et une activité minimale des blocs opératoires la nuit. Pour cela il faudrait que le pouvoir réglementaire fixe un seuil d’activité minimale des blocs opératoires la nuit et le week-end.
Par exemple, si un site chirurgical n’a fonctionné qu’une nuit sur quatre en moyenne les années 2010, 2011 et 2012 et à peine un week-end sur trois, on pourrait, si le seuil est fixé à 30 %, ne pas le désigner comme site chirurgical de garde et reporter sur un autre site les moyens disponibles.
Recommandation n°13 : Fixer un seuil d’activité pour les blocs opératoires et les plateaux techniques chirurgicaux et obstétricaux et fermer ceux qui ne fonctionnent pas suffisamment
Il serait en outre souhaitable de fixer un seuil d’activité pour les blocs opératoires et les plateaux techniques chirurgicaux et obstétricaux et fermer ceux qui ne fonctionnent pas suffisamment, ce qui permettrait une véritable réorganisation des structures et des effectifs, et in fine, des gains d’efficience et de productivité.
Par exemple, si un bloc opératoire ne travaille pendant la journée que trois heures en moyenne, alors qu’il est censé être ouvert de 8 h à 18 h (avec le personnel pour cela) et que le seuil d’activité est fixé à 50 % du temps d’ouverture disponible, on pourrait considérer que ses moyens doivent fusionner avec un autre site.
Nouvelle illustration d’une vision orientée et parcellaire qui, basée sur la seule logique comptable, ne tient aucun compte de l’incidence de ces fermetures sur les patients (conditions et délais d’accès aux soins détériorés), sur les EPS (baisse de l’attractivité donc de l’activité et des recettes) et sur les territoires (atteinte au potentiel de développement). |
Recommandation n°14 : Affiner les analyses pour fixer des seuils minimaux d’activité nécessaires à une qualité suffisante, en tenant compte du type d’intervention, de l’expérience du praticien et de celle de l’équipe
A titre d’exemple purement pédagogique, on pourrait considérer qu’il faut au moins 20 cholécystectomies par chirurgien et par an, pour que l’activité soit considérée comme usuelle, et qu’il faut 50 prothèses totales de hanche (PTH) par an pour qu’un chirurgien orthopédique puisse se déclarer actif et expérimenté en la matière.
4.2.3. Développer les alternatives à la chirurgie traditionnelle
4.2.3.1. Au niveau national
Recommandation n°15 : Elargir la liste des actes de chirurgie conventionnelle soumis à la mises sous accord préalable, afin qu’ils soient plus souvent effectués en chirurgie ambulatoire
Recommandation n°16 : Développer les méthodes de chirurgie de jour et les méthodes alternatives qui permettent une meilleure organisation de la chirurgie conventionnelle
Recommandation n°17 : Apporter une aide à l’entourage pour faciliter les retours rapides à domicile : bonne information donnée à celui-ci, accès à des portages de repas, assistance téléphonique…
4.2.3.2. Au niveau régional
Recommandation n°18 : Ne pas inciter n’importe quel petit établissement à faire de la chirurgie ambulatoire
Il est essentiel de concentrer les sites de façon à avoir des équipes disposant d’un savoir-faire avéré et des files actives suffisantes.
Recommandation n°19 : Veiller à ce que les indicateurs de chirurgie traditionnelle ne se dégradent pas simultanément à l’ouverture de la chirurgie ambulatoire
L’ouverture d’une unité de chirurgie ambulatoire s’accompagne souvent d’une dégradation des durées de séjours des autres services de chirurgie.
A pratique médicale constante, le glissement des malades légers vers la chirurgie ambulatoire entraînera inéluctablement une augmentation de la durée moyenne de séjour en chirurgie traditionnelle. Cela ne signifie pas pour autant qu’il y ait dégradation de la qualité des soins ou des pratiques. |
4.2.4. S’attaquer à la restructuration des services de médecine
Pour cela, il est nécessaire d’améliorer la connaissance de l’activité de médecine à l’hôpital
Recommandation n°20 : Affiner la connaissance des séjours médicaux, mener des études
sur l’organisation, élaborer des grilles d’inadéquation.
Recommandation n°21 : Rationnaliser le fonctionnement des services spécialisés de
Médecine
Sur la base des évaluations d’inadéquations et des écarts de durée de séjour ou de temps/médecin par pathologie, les établissements de santé pourraient proposer des modifications d’organisation visant à les faire disparaître et les ARS pourraient envisager des diminutions de lits d’hospitalisation correspondant aux surplus constatés.
Position normative qui pourrait être pertinente si l’objectif poursuivi était l’amélioration du service existant mais qui est une fois de plus uniquement orientée vers la fermeture de lits et de services. |
Recommandation n°22 : Améliorer la qualité technique et l’efficience des plateaux techniques de biologie et d’imagerie
Il s’agit à terme de certifier ou d’accréditer les services d’imagerie de la même façon qu’on devrait accréditer prochainement les laboratoires hospitaliers.
S’agissant de ces derniers, il faudra tenir compte des résultats d’accréditation et fermer les LABM hospitaliers qui ne répondront pas aux critères ( prix de revient du B est nettement plus élevé que la moyenne des établissements comparables).
4.2.5. Continuer à agir de façon plus qualitative sur la démographie médicale
La démographie médicale représente une contrainte majeure. Il est nécessaire d’agir avec elle et sur elle de façon opportune.
4.2.5.1. Au niveau national
Les difficultés démographiques présentes ou futures tiennent beaucoup plus à la répartition fine des jeunes médecins en formation entre les diverses disciplines et spécialités, entre les régions et les départements et entre les modes d’exercice (libéral ou hospitalier public) qu’au nombre total de médecins formés.
Ces divers aspects ont fait l’objet de recommandations multiples, sur lesquelles la mission ne reviendra pas
4.2.5.2. Au niveau régional
Avant même toute action nationale, le directeur d’ARS peut agir sur le nombre de places de stages formateurs à l’internat, pour faire en sorte que leur nombre et leur localisation correspondent plus strictement à la fois à la qualité de l’enseignement pratique exigée et aux débouchés nécessaires dans les diverses disciplines.
Mais, en dehors de toute démocratie sanitaire ceci est laissé à l’appréciation du seul DG ARS qui peut orienter ses choix pour faciliter les restructurations au lieu d’améliorer la densité médicale et l’accès aux soins. Il en résulte une aggravation des inégalités. |
4.3. Recommandations de bonnes pratiques pour les établissements parties prenantes d’une fusion
La mission a rappelé la nécessité d’assumer la politique de restructuration et de soutenir les acteurs régionaux et locaux. Elle a préconisé la rédaction et la diffusion d’un guide des restructurations.
4.3.1. Expliciter les enjeux et les objectifs du projet de fusion
Recommandation n°23 : Etablir un document d’orientation qui puisse servir de base à l’élaboration d’un projet médical préalable indispensable au projet d’établissement de la nouvelle entité. Elaborer des supports de communication interne et externe sur le projet.
L’explicitation des enjeux et des objectifs recherchés, qu’ils soient médicaux, organisationnels ou économiques, s’impose au niveau local de la même façon qu’au niveau national et régional. C’est la responsabilité du directeur s’il a été « chargé de la mise en place du futur établissement », en application de l’article 31 du décret n° 2005-921 du 2 août 2005 modifié, ou celle du chef de projet doit être désigné pour assurer le pilotage de l’opération si ce n’est pas le cas.
La communication est pratiquée partout mais le plus souvent sur la base d’arguments mensongers assortis de la promesse de lendemains meilleurs (maintien du nombre de lits, augmentation de l’attractivité et de l’activité, rétablissement de l’équilibre financier, etc ) totalement étrangers aux buts réels poursuivis. Dans ce domaine la tromperie est généralisée. Elle a été dénoncée à de multiples reprises par nombre d’interlocuteurs et notamment par l’Association des Maires de France. |
4.3.2. Mettre en place une gestion de projet entre les établissements parties prenantes
Recommandation n°24 : Veiller à ce qu’une méthodologie de gestion de projet soit mise en place entre les établissements impliqués dans la fusion et que des moyens spécifiques soient affectés à l’opération, le cas échéant par l’allocation de crédits dédiés par l’ARS.
La complexité d’une opération de fusion aux plans organisationnel, administratif, juridique et financier rend indispensable une gestion en mode « projet », avec un chef de projet clairement identifié et disposant des moyens matériels et humains nécessaires à la réalisation de sa mission.
Un calendrier réaliste doit être adopté et des points d’étape réguliers doivent être réalisés tant avec les conseils de surveillance et directoires des établissements concernés qu’avec l’ARS afin de s’assurer que le projet reste cohérent avec les objectifs définis et avec le projet médical de territoire approuvé.
4.3.3. S’appuyer sur un binôme médico-administratif solide et reconnu
Recommandation n°25 : Mettre en place un binôme médico-administratif pour porter le projet, mobiliser l’ensemble des équipes et animer le groupe projet.
Ce binôme sera, idéalement, constitué du directeur chargé de la fusion et d’un président de CME capables de mobiliser la communauté médicale et les équipes de direction et d’encadrement.
4.3.4. Formaliser davantage la phase de préfiguration
Recommandation n°26 : Encadrer davantage la phase de préfiguration de la fusion une fois qu’elle a été actée par les conseils de surveillances des établissements, en donnant de véritables pouvoirs au directeur préfigurateur, et en permettant une mise en place anticipée des institutions représentatives et des organes de gouvernance du nouvel établissement.
4.3.5. Mettre en place un accompagnement social de qualité
Recommandation n°27 : Créer une instance de dialogue social spécifique au projet de fusion afin que les représentants du personnel puissent être informés de l’avancement du projet et associés à la résolution des problèmes.
4.3.5.1. Les instances représentatives du personnel doivent être associées en amont.
Les organisations syndicales, le CTE et le (CHSCT doivent être informées très tôt et très clairement du projet de fusion.
Dans les faits, ils ont droit eux aussi aux arguments mensongers et aux promesses fallacieuses évoqués plus haut. |
4.3.5.2. Les dispositifs existants en matière d’accompagnement social des restructurations doivent être recensés et mobilisés.
Recommandation n°28 : Permettre la prise en charge temporaire des frais de déplacement des personnels dont le nouveau site d’affectation est plus éloigné de leur domicile familial comme alternative à l’indemnité exceptionnelle de mobilité (décret et arrêté du 20 avril 2001).
4.3.5.3. Des dispositifs complémentaires pourraient faciliter les fusions d’établissements
Recommandation n°29 : Etudier la possibilité de maintenir temporairement le niveau de rémunération des personnels de direction, des praticiens hospitaliers et des autres personnels concernés par l’opération de fusion.
Une fusion d’établissement conduit nécessairement à une réduction du nombre d’emplois de chef d’établissement et de coordonnateur général des soins. Des dispositions transitoires devraient leur permettre de conserver, à titre personnel et pour une durée limitée, leur rémunération et les avantages accessoires dont ils bénéficiaient avant la suppression de leur emploi.
S’agissant des praticiens hospitaliers et des personnels des plateaux techniques, les fusions d’établissements conduisent fréquemment à réduire le nombre de lignes de garde et d’astreinte.
Cela a une incidence directe sur le montant des indemnités perçues à ce titre par les personnels concernés. Il est souhaitable que des compensations puissent leur être apportées, au moins pendant une période transitoire.
Il en est de même des praticiens bénéficiant de l’indemnité pour activité dans plusieurs établissements dont certains peuvent se voir privés à la suite d’un regroupement d’activités.